Dans le grand orchestre de la transition écologique, nous avons longtemps cru que les solistes – ces consommateurs éclairés brandissant fièrement leurs gourdes réutilisables – mèneraient la danse. Mais voilà que l’Iddri vient bouleverser la partition. L’étude « Quand on peut, on veut » nous propose de reconsidérer la transition non plus comme un concerto pour individu et société, mais comme une vaste symphonie où chaque section de l’orchestre – des politiques publiques aux entreprises, en passant par les infrastructures – joue un rôle crucial.
Fini le temps où l’on attendait du consommateur qu’il entonne seul l’air de la responsabilité écologique. L’Iddri nous propose un renversement des responsabilités : et si, plutôt que d’exiger une prise de conscience individuelle, nous composions un environnement où les pratiques vertueuses deviendraient aussi naturelles que de respirer ? C’est là tout l’enjeu de cette approche par les « modes de vie », qui sonne comme une évidence et pourtant résonne comme une révolution.
Au cœur de cette partition complexe, quatre pupitres environnementaux – physique, socio-culturel, économique et cognitif – dont l’harmonie ou la dissonance façonnent nos pratiques quotidiennes. L’Iddri nous invite à une écoute attentive de cette musique souvent imperceptible qui rythme nos vies, pour mieux en ajuster les notes.
L’approche de l’Iddri se veut une ode à la diversité sociale, reconnaissant que chaque groupe possède son propre tempo, ses propres contraintes et aspirations. C’est dans cette polyphonie que réside toute la richesse – et la difficulté – de la transition.
La méthodologie proposée, en quatre mouvements – du diagnostic à la formulation de trajectoires – invite les chefs d’orchestre de la transition – décideurs publics, entreprises, acteurs de la RSE – à une écoute fine des différentes sections de la société, pour mieux orchestrer le changement.
Pour les professionnels de la RSE, cette partition ouvre de nouvelles portées. Il ne s’agit plus seulement de jouer sa propre mélodie vertueuse, mais de contribuer activement à l’harmonie globale. Cela implique de repenser les chaînes d’approvisionnement, d’investir dans des technologies vertes, et de considérer l’engagement des parties prenantes.
Il y a cependant des dissonances à résoudre. Comment surmonter l’inertie des habitudes, ces airs entêtants qui résistent au changement ? Comment gérer la complexité des interactions entre les différentes dimensions de nos vies? Et surtout, comment s’assurer que cette musique du changement soit perçue comme juste et harmonieuse par tous les auditeurs-acteurs de la société ?
L’approche de l’Iddri est de nous proposer des « récits » pour décrire les trajectoires de changement. Ces récits nous permettent d’imaginer comment les pratiques peuvent évoluer, comment les environnements peuvent se transformer, dans un ballet subtil entre l’individuel et le collectif.
En filigrane de cette partition ambitieuse se dessine une réflexion profonde sur la nature même du changement social comme harmonie collective à construire, dans laquelle il faut reconsidérer la responsabilité de chacun – individus, entreprises, pouvoirs publics..
Cette approche par les modes de vie résonne comme un appel à l’action collective, mais aussi comme un appel à l’humilité. Le changement ne se décrète pas, mais se cultive patiemment, note après note, pratique après pratique.
« Quand on peut, on veut » nous permet de regarder différemment nos vies quotidiennes, de percevoir les contraintes mais aussi les potentiels de changement. Elle nous encourage à devenir, chacun à notre niveau, des compositeurs du changement, contribuant à cette vaste symphonie de la transition écologique.
Dans ce grand concert de la durabilité, chaque geste compte, chaque note importe. Mais c’est bien l’harmonie de l’ensemble, savamment orchestrée, qui permettra de faire émerger cette mélodie d’un monde plus durable, que nous aspirons tous à entendre.
Les entreprises sont au coeur de cette « symphonie du changement »
- Architectes d’environnements vertueux : créatrices d’environnements propices aux pratiques durables. Cela va bien au-delà de la simple offre de produits « verts ». Il s’agit de repenser l’ensemble de l’expérience client pour rendre les choix durables non seulement possibles, mais naturels et désirables. Par exemple, un fabricant d’électroménager ne se contenterait plus de proposer des appareils économes en énergie, mais réfléchirait à la manière dont ses produits peuvent s’intégrer dans et façonner un mode de vie globalement plus durable.
- Orchestrateurs de changements systémiques : Les entreprises sont appelées à jouer un rôle plus proactif dans la transformation des systèmes au sein desquels elles opèrent. Cela implique de collaborer avec d’autres acteurs – fournisseurs, concurrents, pouvoirs publics, société civile – pour créer des écosystèmes favorables à la durabilité. Une entreprise de l’agroalimentaire, par exemple, ne se contenterait pas d’améliorer ses propres pratiques, mais travaillerait activement à la transformation de l’ensemble de la chaîne de valeur alimentaire.
- Innovateurs sociaux : L’innovation ne doit plus se limiter aux produits et aux technologies, mais s’étendre aux modèles d’affaires et aux interactions sociales. Les entreprises doivent devenir des laboratoires d’expérimentation de nouveaux modes de consommation, de travail et de vie. Cela pourrait se traduire par le développement de modèles basés sur l’usage plutôt que la propriété, ou par la création d’espaces de travail favorisant des pratiques de vie plus durables.
- Éducateurs et facilitateurs : Les entreprises ont un rôle crucial à jouer dans l’accompagnement du changement. Elles doivent non seulement informer, mais aussi faciliter l’adoption de nouvelles pratiques. Cela peut impliquer la mise en place de programmes de formation, de systèmes de récompense, ou encore la création d’outils permettant aux consommateurs de mieux comprendre et gérer leur impact environnemental.
- Cartographes des modes de vie : Pour être efficaces, les entreprises doivent développer une compréhension fine des différents groupes sociaux et de leurs modes de vie. Cela nécessite de nouvelles approches en termes d’études de marché et de segmentation, allant au-delà des critères socio-démographiques traditionnels pour saisir les nuances des pratiques, contraintes et aspirations de chaque groupe.
- Narrateurs du changement : Les entreprises sont appelées à jouer un rôle crucial dans l’élaboration et la diffusion de nouveaux récits autour de la durabilité. Il s’agit de rendre désirables et aspirationnels des modes de vie plus durables, en utilisant le marketing et la communication de manière responsable et créative.
- Médiateurs de la transition juste : Les entreprises doivent veiller à ce que la transition soit équitable et inclusive. Cela implique de prendre en compte les impacts potentiellement négatifs des changements sur certains groupes et de mettre en place des mécanismes de soutien et d’accompagnement.
- Métronomes du long terme : Face à la pression du court-termisme, les entreprises doivent ancrer leur stratégie dans une vision à long terme de la durabilité. Cela peut impliquer de repenser les indicateurs de performance, les systèmes de rémunération et les processus de prise de décision pour mieux aligner les intérêts de l’entreprise avec les impératifs de la transition écologique.
Rapport de l’IDDRI https://www.iddri.org/fr/publications-et-evenements/decryptage/quand-peut-veut-conditions-sociales-de-realisation-de-la
Article de Novethic sur ce rapport https://www.novethic.fr/environnement/climat/quand-on-peut-on-veut-le-nouveau-slogan-pour-reussir-la-transition
